Rubi et Yasmin Pigeon par Luna Harst.

Dans nos sociétés de plus en plus globalisées, de plus en plus consommatrices et capitalistes, l’industrie du vêtement se développe à vive allure. Entre la production des matières premières, l’utilisation de produits chimiques, le gaspillage de l’eau, et la surconsommation de vêtements, l’industrie de la mode s’est imposée comme un pollueur majeur de notre planète. La rédaction de Denise s’est penchée sur de nouvelles méthodes pour consommer mieux, de façon plus juste, plus écologique, responsable et transparente et est allée à la rencontre de Rubi Pigeon, fondatrice de la marque d’Upcycling, Rusmin.

Visuel Rusmin

« Pour nous l’Upcycling c’est plus que le vêtement, c’est une manière de communiquer, de s’entraider, et de prendre soin de soi. »

Rusmin est une marque d’Upcycling française crée par les sœurs jumelles Rubi et Yasmin Pigeon. Pour ces deux jeunes femmes, l’éco-responsabilité n’est pas qu’un label, c’est un mode de vie. Élevées dans l’idée qu’il ne faut rien gâcher, elles commencent très jeunes à vendre les vêtements qu’elles ne portent plus sur Depop (équivalent anglais de Vinted). Avec leurs invendus, elles confectionnent de nouvelles pièces, qu’elles vendent à nouveau. Sans le savoir, elles mettent un pied dans l’Upcycling et petit à petit « cela prend ». Ensemble, elles se tournent vers des études de marketing de mode et travaillent en commun pour leur projet de fin d’année sur un fanzine. Intriguées et attirées par des projets différents, elles prennent chacune leur chemin à l’issue de la première année. Rubi entre à la CASA93 à Saint-Ouen, pour elle c’est un déclic : « Là-bas on t’apprend à créer une collection uniquement grâce à l’Upcyling ». Rapidement, le lien s’établit entre ce qu’elle faisait de ces vieux vêtements à quinze ans et ses projets d’étude ; elle reprend Rusmin, et c’est là que tout commence.

« L’Upcycling, c’est ma manière de réagir au monde qui m’entoure et d’offrir ma solution, une solution positive. »

Lorsque je demande à Rubi ce qu’est pour elle l’Upcycling, elle me répond franchement : « c’est redonner vie à un vêtement destiné à aller à la poubelle ». Les deux premières collections sont d’ailleurs fabriquées avec des vêtements récupérés ; mais rapidement, elle se rend compte que les vêtements dont les gens veulent se débarrasser sont souvent de mauvaise qualité et cela se ressent sur le vêtement final. Elle ajoute aussi que cette méthode ne permettait pas de réaliser plusieurs pièces. Pour Rubi c’est frustrant, car « cela ne permet pas de montrer que l’Upcyling est quelque chose de possible ». Pour sa troisième collection, Rusmin a changé de production : Rubi dessine, fabrique le prototype et collabore avec une entreprise qui travaille à récupérer les fins de rouleaux de créateurs. De cette manière elle peut produire plusieurs pièces, satisfaire son public et crédibiliser sa marque. Pour la fabrication, Rubi s’est tournée vers un atelier de réinsertion. Si elle fait ces choix, c’est parce que selon elle, l’éco-responsabilté n’est pas juste un label. En effet, le fait d’être éthique se joue dans tous les aspects de la marque sinon c’est juste du greenwashing. Malgré tout, Rubi veut rester cohérente : « je ne cherche pas à être H&M ou Zara, sinon ce serait mauvais signe. Je ne gagne pas ma vie avec Rusmin mais si je peux aider à consommer mieux, je le fais. »

Collection Rusmin Été 2019 – photo par Gil Anselmi – Mua Louisa Trapier

« Je n’ai jamais voulu être une créatrice à la tête d’une grande marque de fringue, c’était peut-être mon rêve étant petite, mais aujourd’hui je veux faire passer un message dans le vêtement. Je ne veux pas faire de l’argent, j’ai juste envie que ça existe. »

Le message de Rubi contient avant tout quelque chose de positif, pour elle c’est une façon de s’aimer, de se faire du bien et d’en faire aux autres. De cette manière, elle fait aussi du bien à la planète. Là encore, elle souhaite rester cohérente, et pour cela c’est impossible de produire des vêtements en grande quantité tout en mettant en avant une production responsable. C’est aussi le problème avec le fait d’avoir un intermédiaire pour vendre, cela augmente le prix du vêtement et cette idée ne colle pas avec ses valeurs. De ce fait, Rubi vend principalement sur le site Rusmin.fr. En faisant exister Rusmin, elle veut donner sa place à l’Upcyling dans l’univers de la mode, et montrer que l’on peut aimer s’habiller tout en respectant le monde qui nous entoure.

Visuel Rusmin

« Ça plante la graine dans la tête et dans le commun des gens, ça éveille les consciences. »

Pour Rubi, l’Upcyling s’inscrit pleinement dans son mode de vie, elle n’achète que des vêtements de seconde main et remixe ensemble de vieux tissus et vêtements pour en créer de nouveaux. Pour elle, c’est important d’être conscient et cohérent dans ce que l’on fait, c’est pour cette raison qu’elle a de moins en moins peur de partager ses valeurs, parce que les partager l’oblige à les suivre. Rubi garde en tête l’idée d’un chemin vers le mieux, le positif, idées qu’elle partage dans ses vidéos Youtube. Montrer que l’Upcyling est possible c’est aussi partager ses techniques, et rendre le processus moins abstrait. Ainsi, elle tente d’offrir à l’Upcycling une dimension glamour, car pour elle « les gens fonctionnent comme cela, ils ont besoin de tendances ». Dans cette mesure Rubi, n’a pas tant peur de l’effet de mode qui embrasse peu à peu l’éco-responsabilité. Elle considère que cet effet recouvre — dans une certaine mesure bien sûr — une forme de positivité. Depuis quelque temps maintenant, « l’éthique » s’est répandu comme une trainée de poudre et être « engagé.e » est à la mode. « Elles s’y mettent toutes », des grands magazines de modes, aux influenceurs d’Instagram. Même si pour Rubi tout cela n’a rien de cohérent et est largement superficiel, ça éveille les consciences. Dans ce phénomène de mode, il y a du bon et du mauvais mais l’Upcycling a besoin de la tendance pour pouvoir se développer. En comparaison, elle indique « je suis peut-être devenue végétarienne par mode, mais aujourd’hui c’est devenu un vrai combat. ». D’une certaine façon, Rubi tente de se contenter du fait que les gens se mettent peu à peu à y penser, et préfère être optimiste.

« J’ai vraiment l’envie de m’inscrire dans un rythme de deux sorties par an avec des pièces phares, car on ne peut pas produire des vêtements en continu et promouvoir l’éco-responsabilité ».

Avec Rusmin, Rubi veut communiquer un message positif, de bienveillance. Elle travaille à rendre l’Upcyling possible tout en restant proche de ses valeurs. Dans une volonté de cohésion et d’harmonie, Rusmin s’inscrit dans un processus vers le mieux-vivre et le vivre-ensemble. L’Upcyling est une pierre à l’édifice qu’il ne faut pas négliger. En revalorisant des matières jugées jetables et un savoir-faire manuel, elle revalorise aussi le temps et la qualité d’un produit. À long terme, elle aimerait que Rusmin se développe autour d’une collection par an ne contenant que des essentiels.

Pour découvrir son travail, les dessous de ses deux dernières collections ou encore, pour mieux comprendre la fast-fashion et ses travers, rendez vous sur la chaîne Youtube RUSMIN !



4 réponses à « Rusmin et l’Upcycling : quand la création et le self-love contribuent à un monde plus sain »

  1. Avatar de du bitume à la terre

    👍 vive l’upcycling !

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  2. Avatar de Denimistry : quand la mode repense la matière première – Denise

    […] vous intéressez à la mode et à l’éco-responsabilité, nous vous recommandons les articles Rusmin et l’Upcycling : quand la création et le self-love contribuent à un monde plus sain et ENAMI : déconstruire […]

    J’aime

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